Analyse vidéo : par qui ? pour quoi ?

 

Utilisation de la vidéo : par qui ? Pour quoi ?

Le travail d’analyse vidéo est communément plus souvent attribué à l’entraîneur qu’aux joueurs, et on a plutôt tendance à restreindre la liste des bénéficiaires de l’apprentissage par la vidéo aux joueurs de champ et gardiens de but. Ceci est quelque peu paradoxal. L’entraîneur analyse la vidéo et en fait un compte-rendu à ses joueurs (parfois illustré de séquences) pour qu’ils en bénéficient, mais les joueurs sont peu voire pas du tout impliqués dans le travail d’analyse de leur propre performance. Par ailleurs, la pratique de l’entraîneur même est très rarement, voire jamais, sujette à une analyse que la vidéo permettrait pourtant de faire. Cela résulte plus du fait qu’on ne pense pas à se filmer quand on entraîne que d’un refus de remettre en question ce que l’on peut faire.

La vidéo peut être utilisée par chacun, pour soi comme pour autrui.

Qu’on soit entraîneur ou joueur, se voir faire permet de prendre conscience de certains comportements positifs et négatifs qu’on peut avoir. Selon les perceptions et expériences de chacun (habitude d’utiliser la vidéo ou pas, considération de l’outil…) se voir et prendre conscience de ce qu’on fait permet aussi d’identifier les causes possibles de ces comportements, et d’envisager des pistes pour progresser à l’avenir.

L’outil vidéo pour identifier des comportements :

Cette phase est uniquement descriptive. On cherche à savoir ce qui est fait et par qui. Si on analyse un match, on peut faire identifier des comportements chez un joueur, chez l’équipe, et chez le coach. Exemple pour l’attaque en supériorité d’une défense 0-5 :

  • Équipe : se dirige jusqu’aux 9m adverses.
  • Ailier : s’engage dans l’espace interne, entre les défenseurs numéros 1 et 2.
  • Arrière : court au même moment entre les défenseurs 1 et 2, se retrouve proche de l’ailier et des défenseurs, et essaye de déborder le défenseur numéro 3.
  • Pivot : change d’espace.
  • Entraîneur : reproche à l’ailier de s’être engagé interne.

L’outil vidéo permet ensuite d’analyser les causes possibles de l’apparition des différents comportements :

Plus la description sera précise, et plus l’analyse sera facilitée et pourra être objective. En étant plusieurs à analyser la séquence, il est possible pour chacun de dire aux autres quelles informations on a prises et comment on a interprété la situation selon la place et le rôle qu’on occupait. L’idée est de croiser les regards sur la situation qu’on a tous vécue au même moment pour comprendre pourquoi on a réussi ou échoué dans notre manœuvre collective.

Dans le cas présent, si on se base sur le plan de jeu classique qui veut que chacun s’engage dans son couloir de jeu direct lorsqu’on est en supériorité numérique, on attribue rapidement la cause du cafouillage à l’ailier qui aurait du écarter, s’engager entre la ligne de but et le défenseur numéro 1 plutôt qu’entre les défenseurs numéros 1 et 2. Cependant, si on écoute chacun dire ce qu’il a perçu et pourquoi il a agi comme il l’a fait, on peut comprendre qu’il y a un grand intérêt à utiliser l’outil vidéo à plusieurs. Les justifications de chacun peuvent être les suivantes :

  • Ailier : « ben moi j’ai vu qu’il y avait de la place entre le 1 et le 2 donc j’ai voulu y aller mais ça a fermé donc j’ai donné la balle comme je pouvais à l’arrière. »
  • Arrière : « j’ai essayé de le déborder parce que je m’engageais entre 1 et 2. J’ai pas compris pourquoi t’es pas allé fixer externe. Donc quand on s’est retrouvé à 2 dans le même espace j’ai fait ce que j’ai pu, le plan était mal engagé, j’ai essayé de trouver une solution seul ».
  • Pivot : « moi j’ai essayé de changer de place quand j’ai vu le demi-centre venir dans mon espace mais c’était trop tard ».
  • Entraîneur : « OK. Moi, d’où j’étais, j’ai pas vu que l’espace était si ouvert que ça donc j’ai pas compris ton intention. Je pensais que ton intention première aurait été de fixer externe, pas d’essayer d’aller seul au shoot. Je ne pensais pas que l’espace était un peu ouvert. »

En poursuivant la discussion, on comprend que l’ailier a vu l’occasion d’aller au tir et qu’il a tenté sa chance. L’incompréhension générale vient du fait que l’entraîneur, l’arrière et le pivot n’ont pas perçu l’intention de l’ailier. On peut ensuite discuter de la pertinence des intentions. On dit souvent que la première intention à avoir est d’aller au tir si la voie est libre ; doit-on alors reprocher à l’ailier d’avoir vu l’occasion d’aller au tir ?

Ceci est un exemple d’analyse vidéo collective d’une action de jeu.

Exemple d’analyse spécifique au poste de gardien de but : le duel en fin de contre-attaque.

– Phase descriptive : Tireuse adverse : est droitière, arrive sur la partie gauche du terrain, n’est pas gêné par une défenseur pour tirer, prend son impulsion en course, aux 6m, son impulsion va vers la droite, son bras va vers la droite et se situe haut/mi-haut, donc…..

– Phase d’analyse : ….les probabilités que la tireuse shoote coin long ou mi-hauteur sont très élevées.« Que devrait faire la gardienne si elle arrive à percevoir ces indices pendant l’action ? » « Suivre le déplacement de la tireuse pendant son impulsion pour éviter d’être dépassée/contournée, et déclencher une parade couvrant sa partie mi-haute/haute gauche. »

L’ outil vidéo et l’analyse de pratique de/pour l’entraîneur :

Il est très intéressant pour l’entraîneur de filmer une séance d’entraînement et de la regarder ensuite à tête reposée. On peut s’apercevoir qu’on n’a pas été clair quand on a donné des consignes, qu’une régulation n’était pas pertinente, qu’en ayant mis un plot à tel endroit on a empêché l’apparition de comportements pourtant souhaités, qu’un joueur a besoin de plus de conseils que ce qu’on lui donne, etc.. toutes ces observations nous permettent d’être plus rigoureux à l’avenir, tant dans la construction de nos situations que dans notre rapport à ceux qu’on encadre.

Résumé-conclusion :

De manière générale, faire de l’analyse vidéo permet :

  • d’identifier des éléments importants dans le déroulement d’une action individuelle ou collective
  • à partir de cette identification faite seule ou à plusieurs, on peut imaginer les possibilités d’évolution de la situation et anticiper ce qui a le plus de probabilité de se produire
  •  et se fixer des buts de progrès pour l’avenir selon ce qui a été plus ou moins bien réussi.

Plus précisément, les intérêts d’un tel apprentissage, sont :

A l’échelle individuelle (joueur) :

  • prendre des informations et se créer des repères
  • voir la situation sous un autre angle pour envisager des alternatives aux actions menées.
  • se fixer des buts pour progresser

Collectivement, l’intérêt est d’apprendre à évaluer la pertinence et la qualité de la mise en œuvre d’un plan de jeu.

Pour les entraîneurs, utiliser la vidéo permet de :

  • Analyser l’activité de ses joueurs dans les situations.
  • Identifier et analyser leurs réactions émotionnelles.
  • Analyser sa propre activité (évaluer la pertinence des contenus didactiques choisis et l’efficacité des techniques pédagogiques).

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